« Les pouvoirs non délégués aux États-Unis par la Constitution, ni prohibés aux États, sont réservés aux États respectivement, ou au peuple. »
Le 10ème amendement à la constitution des Etats Unis d’Amérique établit le principe selon lequel, les Etats Fédérés disposent d’une compétence générale et les Etats-Unis, c’est-à-dire les institutions fédérales d’une compétence d’attribution.
Autrement dit, toute compétence non explicitement attribuée à la fédération relève de la compétence générale des Etats fédérés.
A de multiples reprises la Cour suprême est venue confirmer ce principe fondamental.
L’article I de la section 8 de la constitution des Etats-Unis d’Amérique liste de manière limitative les compétences de la fédération.
Il s’agit principalement des relations internationales, de la défense, du commerce international et interétatique et de la monnaie.
A titre d’exemple, les Etats fédérés disposent d’une compétence exclusive en matière sociétale.
Alors que les promoteurs de la construction européenne « rêvaient » des Etats-Unis d’Europe, aujourd’hui, le modèle européen promu par la commission européenne et qui ressort du droit européen est sans rapport avec le modèle fédéral américain.
Les Européens et en particulier les français qui hésitent entre d’une part, le modèle de la confédération, c’est-à-dire cette Europe des Nations que Philippe Seguin appelait de ses vœux et d’autre part, le modèle fédéral, ne réalisent pas que le modèle mis en œuvre par les agents de l’Union Européenne, est un modèle qui dans le texte, dans l’esprit et dans la pratique va bien au-delà du modèle fédéral.
Afin que le lecteur puisse mieux comprendre notre propos, examinons quelques articles du traité sur l’Union reproduits ci-dessous :
Article 5-1. Le principe d’attribution régit la délimitation des compétences de l’Union. Les principes de subsidiarité et de proportionnalité régissent l’exercice de ces compétences.
Article 5-2. En vertu du principe d’attribution, l’Union n’agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités pour atteindre les objectifs que ces traités établissent. Toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres.
Article 5-3. En vertu du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l’Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu’au niveau régional et local, mais peuvent l’être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, au niveau de l’Union.
L’examen de l’article 5-2, lequel dispose que « toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres« , pourrait laisser croire que le système européen emprunte l’architecture du système américain et sa dichotomie entre « compétence générale » (réservée aux Etats) et « compétence d’attribution » (du ressort de l’UE).
Pourtant, il n’en est rien. Ces trois articles sont un modèle d’ambiguïté.
Ils sont conçus de telle sorte que le principe d’attribution qu’ils mettent symboliquement en exergue est en réalité vidé de toute sa substance par l’adjonction d’un principe de subsidiarité inversé (subsidiarité ascendante et non descendante) qui permet à la commission de décider de manière arbitraire de l’extension de ses propres pouvoirs bien au delà de sa compétence dite « d’attribution. »
Alors que l’article 5-2 dispose de manière purement nominale que « toute compétence non attribuée à l’Union Européenne appartient aux Etats-membres » et par conséquent prétend fonder la compétence générale des Etats-Nations , l’article 5-3 vient complétement vider de sa substance les fondements de la construction européenne en érigeant un principe de subsidiarité insidieusement inversé et permettant de produire l’effet inverse que celui qui était induit par son sens original.
Dans son encyclique « Quadragesimo anno » publiée le 15 mai 1931, le pape Pie XI évoquait la subsidiarité en ces termes :
«On ne saurait ni changer ni ébranler ce principe si grave de philosophie sociale : de même qu’on ne peut enlever aux particuliers, pour les transférer à la communauté́, les attributions dont ils sont capables de s’acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d’une manière très dommageable l’ordre social, que de retirer aux groupements d’ordre inferieur, pour les confier à une collectivité́ plus vaste et d’un rang plus élevé́, les fonctions qu’ils sont en mesure de remplir eux-mêmes. » (§ 86)
« L’objet naturel de toute intervention en matière sociale est d’aider les membres du corps social, et non pas de les détruire ni de les absorber. » (§ 87)
Citons à nouveau notre article 5-3 :
« dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l’Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu’au niveau régional et local, mais peuvent l’être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, au niveau de l’Union. »
Cette rédaction reflète une profonde malhonnêteté intellectuelle.
Finalement, le principe de subsidiarité censé accroitre les pouvoirs des états est dévoyé de sorte de produire l’effet inverse en permettant à l’entité européenne de se substituer aux Etats membres.
En d’autres termes, le principe de subsidiarité est monté à l’envers.
La subsidiarité ascendante qui va des nations vers l’entité européenne a été substituée au principe de subsidiarité originel qui est une subsidiarité descendante.
Ainsi ce stratagème juridique rend de fait le principe d’attribution quasiment inopérant.
En disséquant cet article, nous pouvons démontrer aisément qu’il revient à inverser le rapport entre compétence d’attribution et compétence générale :
« L’Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres »
En pratique et en application de ce texte, la commission européenne peut se substituer aux Etats dans les domaines de compétence qui excèdent sa compétence d’attribution théorique.
Il suffit à la commission de déclarer eu égard à un domaine qui ne ressort pas de sa compétence matérielle d’attribution, qu’elle considère que les Etats ne sont pas en mesure d’atteindre « de manière suffisante » les objectifs de l’action envisagée et qu’elle pourrait faire mieux.
Autant dire que la commission peut augmenter de manière discrétionnaire ses propres pouvoirs.
Mais le machiavélisme de ces dispositions va encore plus loin, puisque l’on parle « d’action envisagée ». Envisagée par qui ?
C’est ici qu’entre en jeu l’article 17-1 du traité sur l’union européenne qui dispose en ces termes :
« La Commission promeut l’intérêt général de l’Union et prend les initiatives appropriées à cette fin. Elle veille à l’application des traités ainsi que des mesures adoptées par les institutions en vertu de ceux-ci. Elle surveille l’application du droit de l’Union sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne. Elle exécute le budget et gère les programmes. Elle exerce des fonctions de coordination, d’exécution et de gestion conformément aux conditions prévues par les traités. À l’exception de la politique étrangère et de sécurité commune et des autres cas prévus par les traités, elle assure la représentation extérieure de l’Union. Elle prend les initiatives de la programmation annuelle et pluriannuelle de l’Union pour parvenir à des accords interinstitutionnels. »
La commission promeut donc l’intérêt général de l’Union et prendre les initiatives appropriées à cette fin.
La commission non élue se positionne ainsi comme juge de l’intérêt général et dispose d’un pouvoir d’initiative qui conjugué au principe de subsidiarité inversé (ascendant au lieu d’être descendant) la rend quasiment omnipotente et lui permet de se substituer aux Etats-Nations dans pratiquement tous les domaines, y compris le sociétal, qui malheureusement n’échappe pas à cette règle.
A titre d’illustration des conséquences dommageables pour la France de cette appropriation de compétences, on peut citer l’instauration du marché européen de l’électricité qui est juste un non-sens et dont la mise en place ne résulte que d’un attachement aveugle aux dogmes de la concurrence et de l’efficience des marchés.
En conclusion, nous pensons avoir démontré que les institutions européennes ne constituent ni un modèle confédéral ni un modèle fédéral mais plutôt un modèle intégré anti-démocratique car technocratique, et en quelque sorte totalitaire.
Un tel modèle refuse la diversité, n’accorde aucune valeur aux relativismes culturel et démocratique et a vocation à broyer les identités sociétales et culturels nationales.
Les peuples et les nations sont ainsi privés de la possibilité de choisir et d’expérimenter leurs propres chemins sociétaux voire de fixer leurs propres ambitions.
En fait l Europe se substitue aux états sans les protéger ni tenir compte de leurs particularités et le tout sans aucun vote de la population qui avait voté contre Mastricht en France mais sans aucun résultat quel mépris à l Époque de ne pas respecter un vote !!
Ce système a le mérite cependant de faciliter la vie aux politiques des divers Pays car désormais ils ne sont plus responsables c est l Europe ….et sa va devenir vrai quel soulagement mais quel dommage car beaucoup de choses pouvaient être partagées entre nos peuples mais avec leur accord …
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